Le tabac de la place Jules Guesde à travers le temps

2 août 2002, il y a près de 20 ans, fermait définitivement le « Central« , le bar-tabac emblématique de la place Nationale, aujourd’hui remplacé par la BRED. On dit que, à cette grande époque de l’usine Renault, il a été le plus important débit de tabac de France ou le deuxième, on ne sait pas, et comment vérifier ? Voici un petit flash-back tiré des informations que nous avons pu dénicher, avant de vous raconter l’histoire de sa fermeture.

La maison a été fondée en 1860, et c’est aujourd’hui l’un des plus anciens bâtiments encore debout à Billancourt.

Au début du XXème siècle, c’est l’épicerie de Constant et Cécile Courtois. L’épicerie-buvette est parmi les plus photographiées de Billancourt. Il faut dire que les Courtois éditent et vendent leurs propres cartes postales. Au village de Billancourt nous avons recensé pas moins d’une quarantaine de vues du magasin, prises entre 1900 et 1960 ! Ils vendent également de la verrerie et de la faïence et de l’essence en bidons « Moto-Naphta ». Nous avions écrit en 2020 un article entier sur la famille Courtois et leur épicerie.

Au début des années 1900, Renault s’installe et l’usine s’étend en quelques années jusqu’à la place Nationale. Les Courtois, habitués jusque là à servir une clientèle clairsemée et parisienne, voient arriver cette nouvelle clientèle d’un bon œil. Dans le recensement de 1911 on y trouve trois commis, Alphonse Maigret, Jean Vault et Georges Kaiser.

Dans les années 1920, le commerce passe entre les mains de Gustave Tessier et son épouse Adolphine. L’épicerie devient un bar-tabac rebaptisé « A la Civette Nationale« , le garçon de café s’appelle Joseph. Le coin épicerie a disparu et cède la place à un vrai restaurant. Le premier étage est occupé par un billard où viennent jouer les cols blancs de Renault. L’usine est forte de plus de 10.000 employés.

Au début des années 1930 le portail monumental Renault est construit et déverse sur la place Jules Guesde ses 23.000 employés quotidiennement. Une clientèle qui a soif, qui a faim et qui fume. Le Central n’est pas le seul bar de la place, il y a le National, la Régie, le Grand Comptoir du Point du Jour, le Cabaret du Curé, le café-restaurant de la Place Nationale, et d’autres, en tout, huit débits de boissons où chacun avait ses habitudes.

En 1936, au plus fort des grèves du front populaire, André Jourdain est gérant et sa femme tient la caisse. Les garçons de café ont pour nom François et André. Ils sont aux premières loges pour assister aux événements. Aux cuisines, c’est Céline qui officie.

Le tabac prend son dernier nom : le « Central« . Il est la propriété de René Gaston Metayer depuis 1936. Il s’est agrandi sur la rue du Point-du-Jour en absorbant le n°146 (à droite de la photo), qui était son lieu d’habitation. Il devient un point de distribution de presse et PMU. Renault Billancourt emploie alors un nombre record de 42.000 employés en 1950.

En mai 68, la place résonne des clameurs des manifestants, et crier, ça assèche le gosier.

Au début des années 1970, près de 40.000 employés Renault fréquentent encore la place Jules Guesde et le Central ne désemplit toujours pas. En 1975 le nombre de véhicules produits par l’usine atteint un record de 240.000 par an. Ça s’arrose. Ce sont les plus belles années du Central tout cela dans une belle animation que ces photos d’époque nous rendent bien.

Au moment de la sortie des ouvriers, la brasserie est souvent remplie sur trois rangs et il faut faire la queue pour rentrer. Il faut jusqu’à 7 garçons de café pour servir tout le monde.

En 1981, la nouvelle propriétaire s’appelle Christiane Cobigo. A partir des années 80 l’usine n’est plus adaptée aux exigences industrielles et entre dans un long déclin. En 1980 le nombre d’employés descend à 20.000 puis, en 1987, à 5.000. Renault Billancourt ne fabrique plus en 1989 que 85.000 véhicules.

L’usine ferme définitivement ses portes en 1992. C’en est fini du va-et-vient des ouvriers, des conversations animées et des bruits de couverts à l’heure du déjeuner. Le tabac-brasserie voit sa fréquentation décliner pendant 10 années. Seuls des retraités des usines sont restés dans le quartier, ils y sont encore aujourd’hui.

L’événement de la fermeture du Central en 2002 est suffisamment important pour avoir déplacé le BBI, à l’époque. Rendez-vous prochainement pour raconter ce dernier épisode.

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