Le premier village de Billancourt

Avant 1825, Billancourt n’était qu’une grande ferme au milieu de pâturages et un hameau à l’entrée du pont de Sèvres. Il ne serait venu à personne l’idée de parler de village.

En 1825 tout change : Le baron Marie Casimir Auguste de Gourcuff vient d’acquérir l’ancien domaine de la ferme, entre la Seine et l’ancienne route de Sèvres. Il y crée un lotissement destiné à des maisons de campagne pour parisiens aisés.

Pour en faire la promotion, il fait réaliser en 1826 une brochure de six pages qu’il baptise « Nouveau village de Billancourt « . Et, oui, c’est ce document qui est à l’origine du nom de notre blog ! C’est la première fois que le terme « village de Billancourt » apparait. Cette brochure est conservée aux Archives Nationales et on la trouve facilement sur Gallica ou via Google.

Que nous dit ce document promotionnel ?

« Le site y est agréable, la route qui y conduit très-belle: on y est près d’Auteuil, du bois de Boulogne, de St.-Cloud et de Sèvres; on n’est séparé de Meudon que par la rivière; tous les environs offrent de jolies promenades, et cette position est une des plus agréables que l’on puisse trouver aussi près de la capitale ».

Un décor champêtre bien alléchant.

« Ce village réunira tout ce qui peut contribuer à en faire un séjour d’agrément; des rues plantées et bien disposées, une place publique, une église, une belle promenade déjà existante et aboutissant à la rivière…On se propose aussi d’établir un bac ou un pont communiquant avec Bas-Meudon ».

Cette place publique c’est la place Jules Guesde et la promenade qui aboutit à la rivière est la future avenue Emile Zola. Il n’y aura pas de bac et le pont de Billancourt devra attendre 1863 pour être construit.

« Le village de Billancourt ayant de toutes parts des abords faciles, est cependant assez éloigné de la grande route de Sèvres pour n’être pas exposé à l’inconvénient de la poussière.
Tant d’avantages réunis ne peuvent manquer d’attirer l’attention des personnes disposées à dépenser une somme de 30 à 60.000 francs pour se procurer une habitation agréablement située ».

Si un terrain de 2.000 toises (7.500 m²) vallait 60.000 francs, alors son prix ferait aujourd’hui sourire : à peine plus d’un euro le mètre carré ! Et l’investissement promet :

« Les terrains de Billancourt n’ont pas encore atteint a des prix aussi élevés; ils offrent, aux personnes qui voudront en acquérir, la double perspective de jouir d’habitations agréables, et d’obtenir dans peu d’années une augmentation de valeur qui peut facilement s’élever au- delà du double du prix d’acquisition.« 

La brochure contient surtout un plan très intéressant (voir en tête d’article). Outre les lots ouverts à la vente, on y découvre, pour la toute première fois, les rues de Billancourt, tracées par Gourcuff. Le document mentionne également les architectes qui ont collaboré : Camille Piron et Henri Duponchel, décorateurs en vogue.

On reconnait ce qu’on appellera les rues de Meudon, du Point du Jour, Nationale et Yves Kermen, rayonnant depuis la place Jules Guesde. On y devine la rue du Cours et la promenade plantée qui deviendront l’avenue Emile Zola. On voit qu’il est prévu d’installer une double rangée d’arbres, place Jules Guesde, ainsi qu’une fontaine (qui verra le jour deux siècles après !).

Les noms des voies ont bien changé, il ne reste plus aujourd’hui que les rues du Point du Jour, Traversière et d’Issy qui ont conservé leur nom d’origine.

En rouge, figurent un projet d’église, au beau milieu de la rue Nationale, et un projet de salle de danse (appelée également « vauxhall »). Ces deux projets ne verront jamais le jour:

Avec ce plan parcellaire figure également un plan général qui permet à l’acheteur de situer le village, au creux de la boucle de la Seine:

Malgré la brochure, le succès tarde à venir. Huit ans plus tard, sur un autre plan promotionnel (ci-dessous) quelques acheteurs ont déjà construit : on y voit une grande propriété, rue du Point-du-Jour, avec ses jardins et plusieurs autres, à proximité de la rue du Vieux-Pont-de-Sèvres. Mais le reste est encore à vendre et notamment tous les lots en zone inondable. Il n’est plus question de salle de danse, l’église a trouvé sa place au bord de l’ancienne route de Sèvres et un projet de pont apparait au bout de la rue de Meudon.

Gourcuff est un visionnaire mais son concept arrive trop tôt. De plus, il n’a pas une politique commerciale efficace. Il cédera les nombreux lots invendus à un promoteur plus actif : le Comptoir de Crédit de Victor Bonnard. Finie la simple distribution de brochures aux notaires, on passera à l’organisation systématique de journées de visites et d’adjudication à grand renfort de publicité dans la presse.

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