Le 22 septembre 2021, nous vous invitions à la découverte des guinguettes, manèges et bals musettes du quai du Point du Jour, à Billancourt.
A l’écart des habitations et tout proche des fortifications, sur 500 mètres, tout un populo venait s’y amuser à la belle saison. Et il y en avait pour tous les goûts.
La période ? À peu près entre 1875 et 1910.
Sans cesse à l’affut de documents originaux, le Village de Billancourt vient de mettre la main sur 3 nouvelles photographies du restaurant du Père Lapin, que nous avions juste entrevu depuis le quai, sur cette carte postale :
Certes, nous n’entreront pas dans la grande salle, ne fouinerons pas dans les cuisines, ne verrons pas toute une clientèle attablée et joyeuse. Et le photographe n’aura pas saisi ce moment particulier du coup de feu où l’animation est à son comble.
Mais ces photographies n’en sont pas moins précieuses car elles sont à notre connaissance les seules vues rapprochées d’une de ces guinguettes du Point du Jour à Billancourt. Et elles sont belles.
Elles datent de 1902. Le photographe s’appelle Emmanuel Pottier (1864-1921), un des photographes du Paris pittoresque au tournant des 19ème et 20ème siècles. Ses clichés sont déposés à la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris.
En ce beau jour du mois d’août, tout le personnel est sur le pont. Le patron s’appelle Joseph Roux et sa femme Annette. Il est fier de nous convier à la découverte des aménagements. Alors, laissons nous guider, une visite n’engage à rien.
Nous sommes sur le côté gauche du restaurant. C’est le matin avec sa corvée d’épluchage. La lumière d’été venant de droite, depuis le quai, est déjà éclatante. La journée promet d’être belle, la soirée longue.
Emmanuel Pottier a bien mis en perspective l’alignement des tables et des bancs, ni trop proches, ni trop éloignés. Qu’il devait faire bon déjeuner sous les arbres !
Mise à jour du 23 mars 2023 :
et bien si, tout de même, on peut apercevoir des clients attablés, en 1897, soit cinq ans plus tôt, grâce à l’illustrateur Auguste Gérardin (1849-1933) ! Vous aurez remarqué qu’il s’agit du même point de vue que pour la photo précédente.
Pour une clientèle à la recherche de plus de tranquillité et pour les amoureux, des kiosques et bosquets leur sont réservés.
Voici ce que relate l’écrivain Louis Morin dans l’un de ses récits qui constituent » les dimanches parisiens : notes d’un décadent « , daté de 1898 et disponible à la BNF.
Ce récit s’intitule » à la Barrière « . Nous suivons le narrateur, son amie Pompon et toute une noce que cette dernière a entrainée dans son sillage.
» Nous continuons la promenade, nous dépassons le Père Denis, le Petit Chalet, le Vieux Gugusse, et nous voici devant le Restaurant du Père Lapin…dans ce curieux établissement où le lapin abonde sur les murailles et les tableaux en plein vent : le père Lapin en balade, le père Lapin en jugement, etc…Il y a de quoi tenter le pinceau d’un moderniste, car le jardin est gentil, avec ses petits bosquets coupés de constructions rustiques. »
Mais le narrateur n’est bientôt plus en mesure de nous en dire d’avantage : tout à son enthousiasme, il s’est adonné plus que de raison à l’absinthe qui lui aura brouillé le jugement. Nous ne lui en voudrons pas trop. Laissons-le à son mal de cheveux et aux reproches attendris de son amie Pompon.
Voilà, nous n’avons plus rien à vous montrer.
Cette petite visite vous a plu ? Qui sait, peut être reviendrons nous faire un tour au Restaurant du père Lapin pendant la belle saison qui s’annonce ?
Post scriptum : Vous avez peut être remarqué sur la première photo ces têtes géantes qui encadrent l’entrée au restaurant. Au « Village », nous nous sommes bien sûr interrogés sur leur nature et leur provenance. Nous avons bien quelques idées, mais aucune certitude.
Et vous, qu’en pensez vous ? Toute suggestion et tout élément de preuve seraient les bienvenus !
Le Village de Billancourt 