L’hôpital Ambroise Paré de Billancourt

Non, ce n’est pas une coquille, l’hôpital Ambroise Paré est bien né à Billancourt. Le Village vous raconte cette histoire.

Tout commence par une grande clinique privée : le « sanatorium de Boulogne-sur-Seine« . Il est fondé à la fin du XIXe siècle par Paul Sollier (1861-1933) et Alice Matthieu-Dubois (1862-1942), un couple de psychiatres. Paul Sollier est un pionnier de la neurologie et de la psychologie médicale, notamment par ses travaux sur l’hystérie, la mémoire, et la rééducation des troubles psychiques. Il a contribué à jeter les bases de la neuropsychologie moderne.

Alice est la première bachelière noire et première noire Française à devenir docteure en médecine, en 1887. Elle est également la première médecin française directrice d’un établissement de santé privé.

Marcel Proust, nerveusement affecté par le décès de sa mère, fait un séjour dans ce sanatorium, entre décembre 1905 et janvier 1906. L’établissement, luxueux, est réputé pour la qualité de ses soins et fréquenté par la haute société parisienne.

Marcel Proust par Jacques-Emile Blanche 1892
Marcel Proust par Jacques-Emile Blanche 1892

Une vaste clinique aux portes de Paris

La propriété occupe 16 000 mètres carrés, entre la rue Castéja et la rue de Saint-Cloud (Yves Kermen). Les bâtiments sont bâtis par l’architecte Henri Nicard dans le style régionaliste en 1897. L’accès principal est au 145 de la route de Versailles (avenue du Général Leclerc). Il comprend plusieurs bâtiments plantés dans un vaste parc arboré et fermé. Ce parc trouve ses origines dans le beau jardin crée au milieu du XIXe siècle par l’anglaise lady Elisabeth Hunloke et dont le Village de Billancourt a révélé récemment l’existence.

Le sanatorium traite les maladies nerveuses et propose des cures de désintoxication pour alcooliques, morphinomanes ou cocaïnomanes, entre autres. Le sanatorium utilise l’hydrothérapie, l’électrothérapie et abrite une grande piscine.

Les aliénés, les malades épileptiques, atteints de maladies aiguës ou contagieuses n’y sont pas admins. En 1905, les tarifs mensuels vont de 800 francs par mois en seconde classe à 2 000 francs en classe de luxe. Les conditions financières pour les morphinomanes sont curieusement plus strictes : ils paient deux mois d’avance. Un indicateur de 1913, nous dit qu’on y soignait, en moyenne 45 malades, mais il y avait de quoi y loger 20 de plus.

Mais, au cours du début de XXe siècle, le voisinage s’industrialise. La première guerre mondiale transforme Renault en une usine d’armement géante, bruyante et polluante. Les conditions de séjour se dégradent et les clients se font plus rares. Ses affaires déclinant après la Grande Guerre, Paul Sollier cherche à s’établir à Saint-Cloud1 et met sa clinique en vente. La municipalité d’André Morizet se montre très intéressée. Se rendant compte de la difficulté à gérer un projet de cette nature, le maire contacte le directeur de l’Assistance Publique et lui demande s’il accepterait d’exploiter un hôpital à Boulogne.

Le premier hôpital public de la banlieue ouest

L’Assistance Publique rachète le sanatorium en 1921 pour 3 600 000 francs, avec la participation de la municipalité de Boulogne, à hauteur d’un million de francs. On le baptise, en 1924, du nom d’Ambroise Paré, père de la chirurgie moderne. Il devient alors le premier hôpital public de la banlieue ouest. Après 9 millions de francs de dépenses et des devis initiaux dépassés, il ouvre ses portes le 2 novembre 1923 et propose des consultations de médecine générale dans un nouveau bâtiment élevé à l’angle de l’avenue.

En janvier 1926, après agrandissements, il comprend un service de chirurgie, deux services de médecine, et un service de pédiatrie, il accueille 250 lits. D’autres services de consultation viennent s’y ajouter et le nombre des journées d’hospitalisation s’élève à 92 382 par an. En 1940, l’hôpital propose 308 lits.

La municipalité de Boulogne insiste longtemps pour qu’une maternité soit adjointe à l’hôpital, mais les crédits manquent.

Déménagement au nord de Boulogne.

Alors, pourquoi est-il maintenant ailleurs ? Le bombardement anglais du 3 mars 1942 qui vise l’usine Renault, touche durement l’hôpital. Heureusement, les patients avaient été évacués rue Boileau à Paris. Mais les bâtiments sont rendus inutilisables.

Il est décidé de le rebâtir en l’éloignant des nuisances provoquées par les usines Renault. Après de multiples projets et d’âpres négociations, la baronne de Rothschild consent, en 1962, à vendre à la municipalité six hectares de terrain, à proximité du château. C’est à cet endroit qu’est bâti l’hôpital actuel.

Il ne reste aujourd’hui plus aucune trace du sanatorium de Paul Sollier.

Il faut imaginer l’hôpital approximativement sur le bloc occupé aujourd’hui par le Bricorama et la concession Renault.

Hopital Ambroise Paré avantBricorama
L’angle de l’avenue du Général Leclerc et de la rue Yves Kermen en 1930 et en 2023. Source : Google.
Sanatorium de BoulogneAprès 2
L’angle de l’avenue du Général Leclerc et de la rue Casteja en 1920 et en 2023. Source : Google.