Une visite des activités coopératives Renault de l’îlot Q

Voici un titre qui pourrait vous paraître bien austère, mais ne fuyez pas déjà et soyez rassurés, il n’y a là rien de rébarbatif. Et comme toujours au « Village de Billancourt », une large place est réservée aux illustrations.

Nous avons souhaité aujourd’hui vous faire découvrir les activités peu connues de la « Société Coopérative de Consommation des usines Renault » en 1916-1917, mais aussi vous faire visiter ce coin de Billancourt qui vécu tant de bouleversements au XXe siècle : il s’agit, dans le jargon Renault, de l’îlot Q. Mais au fait, vous le connaissez déjà !

Une initiative généreuse

La grande guerre de 1914-1918, s’éternise et apporte son lot de misères. Les denrées sont rares et chères, la spéculation prospère, le marché noir devient un passage presque obligé.

En mars 1916, une délégation composée d’employés de l’usine Renault (pointeur, ajusteur, chef d’équipe…) se propose de « viser avant tout l’économie domestique par la vente aux meilleures conditions possibles de tous les produits nécessaires à un ménage ». Le moyen : s’approvisionner directement auprès des fournisseurs mis en concurrence et veiller à éradiquer toute forme de spéculation.

Cette délégation est reçue favorablement et encouragée dans sa démarche suite à audience auprès du grand patron, Louis Renault.

Voici la première page des statuts de la société :

Usines Renault de Billancourt. Leurs restaurants coopératifs en

Au moment de sa création, en avril 1916, la coopérative prévoit :

  • un magasin d’épicerie, beurre, œufs, fromage ;
  • un magasin de mercerie, bonneterie, vêtements de travail, chaussures ;
  • une boucherie charcuterie ;
  • un chantier de bois et charbons.

Afin d’éviter donc toute tentative de spéculation des sociétaires, sont créées des cartes de consommation basées sur « le nombre de bouches de chaque famille de coopérateur » : carte de sucre, de charbon, de bois, de vin…système amené à être étendu « au fur et à mesure des nécessités ».

De même, la coopérative, « pour les ouvriers n’habitant pas dans le voisinage immédiat de l’usine » a considéré « comme un devoir social » de créer :

  • une cantine ouvrière pour 2 000 personnes ;
  • un restaurant pour les employés, alimentant 800 personnes ;
  • un restaurant pour les ouvriers, de 2000 couverts.

Un publi-reportage daté de 1916-1917.

Un album photo, consultable auprès de la BNF, montre ces aménagements intérieurs et extérieurs.

Usines Renault de Billancourt. Leurs restaurants coopératifs en

Il s’agit en fait de 2 albums, le premier consacré à la visite d’Albert Thomas, organisateur de l’armement pendant la Grande Guerre et le second à ces restaurants, cantines, entrepôts et magasins coopératifs de l’usine. Certains d’entre eux étaient situés sur l’îlot Q.

Mais enfin, cet îlot Q, c’est quoi exactement ?

Louis Renault fait ses achats …

En juillet 1916, Louis Renault fait l’acquisition auprès des héritiers de la veuve Heinrich de deux terrains : le premier de 9 750 m², entre les rues du Point du Jour et Heinrich, et le second de 7 666 m² entre les rues Heinrich et Yves Kermen (de Saint-Cloud) et le passage Deschandelliers.

Voici comment se présentaient les deux terrains sur le cadastre de 1905, inchangés à la veille de leur acquisition.

Sur le premier terrain de 9 750 m² sont indiqués les bâtiments de la ferme dite Delaguepierre au 119 de la rue du Point du Jour, et au 117 la maison où la veuve Heinrich aura vécu près de quarante ans. Leur histoire vous est contée dans notre post « La deuxième ferme de Billancourt ».

Le deuxième terrain de 7 666 m2 est non bâti.

Cet agrandissement d’une vue de 1912, donc 4 ans avant leur rachat, laisse entrevoir beaucoup de verdure.

En arrière-plan de cette vue : Issy les Moulineaux puis Paris. La voie de gauche est la rue du Point du Jour, coupée en bas par la place Jules Guesde.

Le beau bâtiment du centre est « l’immeuble décoiffé », alors tout récent, sur le côté duquel on aperçoit la rue Heinrich. L’aspect verdoyant de la propriété, à droite de cette rue, est très évident.

… et bouleverse les lieux en créant les îlots Q et M

Comme à son habitude, Louis Renault a des projets concernant ces nouveaux terrains, et va rapidement transformer la physionomie des lieux. Voyez ces 2 vues aériennes de 1919 : nous sommes trois ans seulement après leur acquisition.

Le 2ème terrain (en bleu) est consacré aux activités industrielles. C’est l’îlot M. Un grand hangar consacré aux essais sur route, l’atelier « M6 », l’occupe presque entièrement. Il était encore debout vers 1990. L’école pilote du numérique, 3ème groupe scolaire du Trapèze, l’a en partie remplacé depuis.

Mais le 1er terrain (en rouge), outre le dispensaire et les baraquements chinois que nous avons déjà présentés, va abriter une grande partie des activités coopératives. Voici lesquelles à travers les photos de l’album dont nous avons extrait les photos et complété les légendes.

Mais aussi des magasins et entrepôts coopératifs et une boucherie.

Hors de l’ilot Q, mais à proximité :

Une pharmacie mutuelle, toujours dans « l’immeuble décoiffé », mais côté rue de Saint-Cloud (Yves Kermen) fut créée. Cette photo ne figure pas dans l’album, mais nous avons jugé intéressant de vous la montrer :

Les autres installations coopératives hors de l’îlot Q 

Et au sein des usines :

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