L’école de la rue Thiers

Voilà un bâtiment qui n’a pas bougé d’un poil, ou presque. L’école de la rue Thiers a vu passer des générations entières de boulonnais, et peut-être vous-même ?

À la fin du XIXe siècle, la population de Billancourt croit rapidement et il faut bâtir de nouvelles écoles. C’est ainsi qu’a été construit le groupe scolaire de la rue de Clamart (actuelle école des glacières), dont nous avions parlé il y a quelque temps.

Puis on construit en 1883 une « école en bois » pour garçons, installation provisoire dans une ancienne usine, à l’angle des rues Thiers et du vieux Pont de Sèvres (aujourd’hui Marcel Dassault). Puis l’acquisition d’un terrain adjacent, appartenant au fabricant de cirages Bisseuil, permet d’obtenir la superficie voulue pour un nouveau groupe scolaire.

Le projet est initié par C. Billoret, architecte municipal, mais c’est son successeur,  Alexandre Barret (1863-1921), qui dessine les plans et le mène à bien. Barret a également dessiné la salle des fêtes, place Bernard-Palissy, et l’hospice de la rue des Abondances. La similarité de style avec ce dernier est d’ailleurs frappante.

Le groupe scolaire public de la rue Thiers, est inauguré en 1897.

Barret donne aux bâtiments des formes irrégulières, des volumes variés, sous des toitures débordantes, qui lui donnent sa personnalité. La pierre blanche et la brique contrastent harmonieusement avec les murs de meulière.

Les classes ne sont pas encore mixtes, l’école de filles est au n°85 de la rue Thiers, tandis que celle des garçons est au n°87.

En 1904, L’école de garçons comporte 8 classes élémentaires et l’école de filles, 7 classes, pour près de 840 élèves. C’est à peu près le même effectif que pour les autres écoles communales de Boulogne-Billancourt (rue Fessart, rue de Clamart, ancienne Mairie). À cela s’ajoutent des classes de garde, après les cours, fréquentés par plus d’une centaine d’enfants.

La directrice de l’école de filles selon les recensements de 1901 et 1911 s’appelle Cécile Bottani, une boulonnaise, épouse d’un comptable. Côté directeurs de l’école de garçons, on trouve Victor Tafin (1901) puis Arthur Cellier (1911). Ils vivent sur place avec leur famille.

Du côté de la rue du Vieux Pont de Sèvres (rue Marcel Dassault) on installe une école maternelle (au n° 65) qui héberge 400 filles et garçons, regroupés en cinq classes. (L’école maternelle a, aujourd’hui, été transférée rue du Dôme).

Ce sont donc en tout plus de 1 200 élèves qui, chaque jour, sont scolarisés dans ce groupe scolaire, en 1904.

L’école abrite une cantine scolaire, durant l’hiver seulement. La concierge de l’école, faisant office de cantinière, y sert du ragoût ou du bouillon avec du bœuf pour le prix modique de 15 centimes (gratuit pour les familles nécessiteuses)

Le bâtiment principal est surélevé en 1913 pour faire face à l’accroissement des besoins.

Ecole Thiers depuis la rue du vieux pont de Sèvres
Côté rue du vieux pont de Sèvres (Marcel Dassault). L’école maternelle.

Aux archives municipales, on peut consulter une « Histoire architecturale du groupe scolaire Thiers à Boulogne-Billancourt », une étude d’architecture, datée de 1997 (Cote 720/Bou.11).

L’école aujourd’hui

L’école finira par prendre un 4ème étage. On peut le voir peint en rouge aujourd’hui.

Son nom officiel est « école élémentaire publique Adolphe Thiers ».  C’est une des 14 écoles élémentaires de Boulogne-Billancourt. Elle accueille plus de 400 élèves, du CP au CM2.

Situation sur un plan de 1919.

Pour finir sur une anecdote, voici un extrait du discours d’inauguration, très anticlérical, prononcé, le 4 décembre 1897, par le maire Edouard Jochum, radical et franc-maçon notoire. Il ne passerait certainement pas, aujourd’hui  :

« Avant 1789, l’Eglise faisait des serviteurs de Dieu, non des hommes et des citoyens. La Révolution voulait faire des hommes égaux et libres ; il fallait qu’ils fussent éclairés… L’œuvre de la République a dressé devant le clocher traditionnel des communes rurales l’école, cet autre temple. Ce fut pendant un temps une guerre généreuse déclarée à l’obscurantisme… Eh bien ! après tant d’inaugurations célèbres, vous allez procéder à l’ouverture d’un nouveau groupe scolaire. Il faut relever cette date, M. l’Inspecteur, non comme une victoire de l’esprit républicain sur le sectarisme, car il y a longtemps que Boulogne à rompu les chaînes, mais comme la preuve nouvelle de l’agrandissement incessant d’une commune dont la population augmente chaque année ».

Une autre époque…on n’oublie pas que sept ans plus tard, en 1904, le « père Combes », président du conseil des ministres, prononcera l’interdiction d’enseigner aux congrégations religieuses sur tout le territoire français et l’expulsion des communautés récalcitrantes.


Carte postale en tête d’article : Coll. S. Légère.

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