Pour beaucoup d’entre nous c’est « le grand bâtiment Renault au bout du parc de Billancourt ». Vous savez, l’immeuble en briques beige, entouré depuis des années par cette palissade moche. Il a un nom : c’est le bâtiment Pierre-Dreyfus et il a été le siège de Renault durant 50 ans. Il est peut-être temps d’en dire deux mots.
On le distingue bien au centre du panorama ci-dessus (un cliché aérien de Roger Henrard des années 60). C’est le seul bâtiment qui n’a pas un aspect industriel.
A l’issue de la première guerre mondiale à laquelle il a grandement participé, Renault est devenu un groupe automobile riche et puissant. Il a fourni à l’armée des chars, des munitions et des véhicules de transport. L’usine a crû à une vitesse prodigieuse. La paix revenue, il lui faut un siège à sa mesure. La société de Louis Renault rachète en 1918 la propriété de sa mère, décédée l’année précédente.

Il bâtit, en 1919, ce long bâtiment de 80 mètres auquel on donne le nom de bâtiment « X », suivant son habitude de nommer ses bâtiments par une lettre de l’alphabet. Il y transfère son bureau.

On laisse les arbres sur l’autre moitié de la parcelle pour constituer un jardin d’honneur. On y adjoint un ouvrage évoquant les deux montants d’un portail. Ce portail de ferronnerie surprenant, baptisé « grille du coq », figure deux têtes de coqs tenant chacun un lampadaire dans le bec. Il existe toujours.


L’accès à l’ensemble se fait du côté de l’avenue du Cours (Emile Zola) par deux portes identiques qui ont été préservées.

On rebaptise le bâtiment « X » en « bâtiment Dreyfus », d’après Pierre Dreyfus qui en a été le PDG de la régie entre 1955 et 1975.
C’est dans ces locaux que les grandes décisions industrielles sont prises. Il connait également bien des bras de fer entre représentants syndicaux et patronaux, dans les années chaudes du front populaire. En 1968, à l’époque où Billancourt est à la pointe de la contestation sociale en France, c’est dans ce bâtiment que s’échafaudent les décisions.
Puis, en 1975, le siège est transféré ailleurs.
L’immeuble reste toujours la propriété de Renault. Il constitue le plus grand vestige de l’usine de Billancourt aujourd’hui. Il n’y a plus que l’enveloppe extérieure et les deux entrées qui soient encore d’époque. L’intérieur a été entièrement rénové en 2019 par SAA Architectes dans un style moderne et épuré. Sur 3500 mètres carrés, il abrite des bureaux, salles de réunions et un business center. Il ne se visite pas.


Dans le jardin on peut encore trouver la cabane dans laquelle Louis Renault a construit sa toute première voiturette (voir notre article). Elle ne se visite que très rarement.


Vous avez remarqué que le bâtiment n’est pas aligné sur les rues environnantes ? Il l’était à l’époque : le bâtiment bordait à l’est la rue Gabrielle et à l’ouest, l’avenue du Cours. Ces rues ont aujourd’hui disparu (vous pourrez les retrouver sur ce plan de 1909).



Une dernière chose, messieurs de chez Renault : quand comptez-vous retirer ces palissades et intégrer ce bâtiment dans la perspective du parc ?
Voir également ce post du forum rives de Seine qui lui est consacré.
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